chroniques

Battle Collignon VS Pedron :
ça barde sous les pommiers

Battle sous les pommiers
samedi 28 mai 2022
Battle sous les pommiers

Pierrick Pedron : sax alto
Elie Martin-Charrière : batterie
Thomas Bramerie : contrebasse
Carl-Henri Morisset : piano
Christelle Raquillet : flûte, voix
 
Médéric Collignon : trompette
Lionel Suarez : accordéon
Sylvain Luc : guitare
Bernard Lubat : batterie, piano
Léna Aubert : contrebasse

Barde : n.m. Poète celtique qui célébrait les héros et leurs exploits.
Barder : v.i. familier Prendre une tournure violente. Ça va barder ! ➙ chauffer.
(merci Robert)

À vous de choisir ! Ça a effectivement bardé au théâtre avec cette battle sous les pommiers, et si les compères musiciens présents sur scène sont aussi des poètes – ce n’est pas Bernard Lubat qui me contredira –, on peut aussi considérer qu’ils sont plutôt les héros dont on célèbre les exploits…

Celles et ceux qui étaient présents pendant la résidence de Thomas de Pourquery se souviennent forcément de la soirée épique qui l’avait opposé à l’époque à une formation québécoise, spectacle coanimé par Alex Dutilh et Stanley Péan, animateur de Radio Canada. On retrouve aujourd’hui le même Alex Dutilh (pieds nus, en hommage à Rhoda Scott), accompagné cette fois par sa complice de France Musique Nathalie Piolé. Ils jouent tous deux le double rôle de juge-arbitre et de coach d’une des équipes.

Pour ce qui est des musiciens, on a d’un côté Pierrick Pedron, entouré de ses compagnons habituels : Elie Martin-Charrière, Thomas Bramerie, Carl-Henri Morisset, et de la flûtiste caennaise Christelle Raquillet. De l’autre côté, Médéric Collignon, a mis en place pour l’occasion une équipe inédite, où l’on retrouve Lionel Suarez, Sylvain Luc, Bernard Lubat et Léna Aubert.

Le principe est simple. Deux chapeaux contiennent des petits papiers à tirer au hasard tout au long de la soirée : dans le premier, des thèmes, qui vont du standard à la chanson ; dans le second, des contraintes à respecter, afin de pimenter un peu les choses. Les spectateurs votent à chaque fois à l’aide d’un carton rouge ou blanc. Après une présentation enjouée de la soirée, le match peut commencer, avec « Good Bye Pork Pie Hat » et comme contrainte l’obligation d’alterner entre les deux orchestres. On reste pour l’instant ici bien raisonnables et sages… il ne s’agit encore que d’un « tour de chauffe », et les musiciens achèvent d’ailleurs le titre tous ensemble, les deux groupes se mélangeant allègrement. On rentre ensuite dans le vif du sujet : il faut cette fois improviser totalement sur le thème du coup de foudre, le tout en jouant à genoux… L’ambiance monte rapidement et, pour le troisième défi, nos résidents actuels, Théo Ceccaldi et Fidel Fourneyron, sont invités à se joindre aux deux troupes, pour un « Song For My Father » qui doit être joué de plus en plus rapidement, sur une durée fixée à 5 minutes. Les cartons jaunes pleuvent à la fin du titre, l’équipe de Pierrick n’ayant tenu que quatre minutes tandis que celle de Médéric a dépassé le temps imposé de… 18 secondes ! Mauvaise foi et bonne humeur sont ici les deux mamelles de cette joute joyeuse et foutraque, qui repose sur un équilibre subtil entre l’humour et la musique, en permanence sur le fil du rasoir… une mécanique délicate qui ne peut fonctionner que grâce au talent des musiciens présents et à l’amitié qui lie les deux leaders. Pas facile, pourtant, de jouer « Besame mucho » avec des masques chirurgicaux et des gants à vaisselle, ou encore « Autumn Leaves » avec une seule main, ce qui donnera d’ailleurs à Bernard Lubat l’occasion de rappeler que « les feuilles mortes se rappellent à la masse » ou d’asséner à Médéric « c’est mieux quand tu joues d’une main »… Jouer d’une seule main, certes, mais avec pour l’autre le poing levé… comme le précise Médéric : « Au moins, ça voudra dire quelque chose ! »

La battle se termine sur un quasi ex-aequo : 4-3 pour l’équipe de Pierrick, qui gagne pour l’occasion une simple bouteille de jus de pomme tandis que le perdant se voit offrir… une bouteille de Calvados ! Avec élégance, le saxophoniste propose à Médéric d’échanger leurs prix, mais bien sûr sans succès. En guise de rappel, les musiciens entament le fameux « Soul Makossa » de Manu Dibango, y glissant un « joyeux anniversaire » dédié à Denis Lebas qui fête ce jour-là ses 60 ans, un « Happy Birthday » repris ensuite en chœur par tout le public du théâtre.